Ce dossier consacré à Amistad est d'abord destiné aux enseignants du secondaire qui verront ce film avec leurs élèves (entre quatorze et dix-huit ans environ). Il propose plusieurs animations autour du film, de ses principaux thèmes et de son actualité. L'extrait proposé ici revient sur le contexte historique évoqué par le film.
Dix questions à propos de
Amistad de Steven Spielberg
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Les mutins de l'Amistad ont abordé finalement :
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dans le nord des États-Unis;
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dans le sud des États-Unis;
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dans une région des États-Unis sous domination britannique.
réponse suggérée
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Aux États-Unis au moment de l'affaire de l'Amistad,
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la traite et l'esclavage étaient autorisés;
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la traite était interdite, et l'esclavage aboli dans un certain
nombre d'États seulement;
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la traite était interdite mais l'esclavage autorisé dans
tous les États.
réponse suggérée
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Pourquoi la reine Isabelle II d'Espagne intervient-elle dans le procès
de l'Amistad?
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Elle est la propriétaire des esclaves.
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Cuba étant un pays indépendant, l'Amistad est bien un bateau
cubain et non pas espagnol, mais Don Pedro Montez et Don José Ruiz,
propriétaires des esclaves étaient espagnols (le capitaine
cubain du navire ayant lui été assassiné par les mutins).
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L'Amistad est un bateau espagnol, Cuba étant alors une colonie espagnole.
réponse suggérée
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Cinque et ses compagnons ont été transportés d'Afrique
vers l'Amérique sur :
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l'Amistad;
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le Tecora;
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un autre bateau.
réponse suggérée
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Pourquoi les marins du bateau esclavagiste ont-ils précipité
des Noirs à la mer?
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Par cruauté, par sadisme, pour terroriser les Noirs et empêcher
toute révolte.
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Ils étaient poursuivis par un navire britannique.
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Ils avaient prévu trop peu de nourriture pour la longueur du voyage.
réponse suggérée
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Quelle est la base de la défense des Noirs révoltés
de l'Amistad lors des deux premiers procès?
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La traite des Noirs étant interdite, on ne pouvait enlever de force
Cinque et ses compagnons.
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L'esclavage est contraire aux droits de l'Homme, et donc Cinque et ses
compagnons sont des hommes libres.
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L'esclavage ayant été aboli dans le nord des États-Unis,
Cinque et ses compagnons doivent retrouver la liberté.
réponse suggérée
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Pourquoi John Quincy Adams n'accepte-t-il pas immédiatement de défendre
les Noirs de l'Amistad?
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Il considère que l'affaire n'est pas assez importante pour qu'il
s'en occupe.
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Il pense qu'une argumentation purement commerciale est à ce moment
plus judicieuse.
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Il est trop vieux pour s'occuper de cette affaire.
réponse suggérée
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Pourquoi le président Van Buren nomme-t-il un nouveau juge et fait-il
recommencer le procès?
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Il est partisan de l'esclavage et ne supporte pas que des esclaves révoltés
puissent être libérés.
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Il craint la réaction négative des États du Sud.
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Il redoute la réaction négative de l'Espagne qui était
alors la troisième puissance mondiale (après l'Angleterre
et la France).
réponse suggérée
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Que prouve le cahier saisi sur l'Amistad?
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Les esclaves de l'Amistad n'ont jamais séjourné à
Cuba.
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L'Amistad a saisi des esclaves sur la côte africaine.
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Les esclaves de l'Amistad ne sont pas nés à Cuba mais en
Afrique.
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L'Amistad est en fait le Tecora maquillé.
réponse suggérée
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Quelle est l'argumentation du sénateur sudiste John Calhoun lors
de la réception donnée par le président?
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Les Noirs sont des êtres inférieurs qu'il est légitime
de maintenir en esclavage.
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Moins riches que les États du Sud, les États du Nord veulent,
par jalousie, l'abolition de l'esclavage.
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Plus riches que les États du Sud, ceux du Nord considèrent
les gens du Sud comme immoraux et inférieurs et sont prêts
à les ruiner en abolissant l'esclavage.
réponse suggérée
Quelques éléments de réponse
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L'Amistad a abordé dans le nord des États-Unis
à l'extrémité est de Long Island, une île voisine
(par l'ouest) de Manhattan. Mais Gedney, le capitaine du bateau américain
qui arraisonna l'Amistad, préféra le remorquer vers New Haven
dans le Connecticut, légèrement au nord, parce que l'esclavage
n'était pas encore aboli dans cet État (même si les
esclaves y étaient peu nombreux), ce qui était le cas en
revanche à New York. Il espérait ainsi que les Noirs seraient
plus facilement reconnus comme esclaves et qu'il pourrait en retirer une
prime pour son «sauvetage».
Le voyage du Tecora et de l'Amistad
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À cette époque, la traite était
interdite aux États-Unis, mais l'esclavage encore pratiqué
dans de nombreux États du sud du pays. Cela signifiait que les nouveaux
esclaves étaient supposés être des enfants d'esclaves.
Dans les faits, la demande était telle que la reproduction naturelle
des esclaves était insuffisante et que la traite continuait
illégalement. L'interdiction de la traite a eu cependant pour effet
que les propriétaires d'esclaves dans le Sud des États-Unis
ont généralement mieux pris soin d'eux pour éviter
qu'une mortalité trop élevée ne les prive définitivement
de cette main-d'oeuvre servile.
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Cuba était à cette époque une
colonie espagnole, et l'Amistad et ses passagers étaient considérés
comme espagnols.
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Le Tecora était en fait un navire battant
pavillon portugais, car l'Espagne avait signé en 1817 un traité
avec la Grande-Bretagne interdisant l'importation d'esclaves en provenance
d'Afrique. Mais l'Espagne n'avait pas réellement l'intention de
respecter ce traité (qui lui avait été imposé
par la Grande-Bretagne) et ne faisait rien pour empêcher la traite.
Les négriers utilisaient alors des pavillons de complaisance comme
celui du Portugal. L'Amistad était, quant à lui, un bateau
beaucoup plus petit qui n'était pas fait pour traverser l'Atlantique:
il devait seulement servir à transporter les esclaves de La Havane
(à Cuba) à un autre point de l'île (voir la carte
ci-dessus).
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Comme l'explique l'officier britannique chargé de réprimer la traite, ce n'est pas par cruauté (même s'il fallait une bonne dose de cruauté pour agir de cette façon)
que les négriers du Tecora ont jeté une partie des esclaves
à la mer mais parce qu'ils avaient mal calculé la quantité
de nourriture nécessaire à leur cargaison humaine (ou bien
la durée de la traversée qui durait à cette époque
environ deux mois mais que le manque de vent pouvait considérablement
allonger). Mais il est également arrivé que des négriers
jettent leurs captifs à la mer lorsqu'ils étaient poursuivis
par la marine britannique chargée de réprimer la traite des
esclaves.
Il faut savoir que la Grande-Bretagne fut à la pointe du combat
antiesclavagiste, même si, comme, beaucoup d'autres pays européens,
il y avait des esclaves dans ses colonies: c'est en 1807 que la Grande-Bretagne
abolit la traite, mais ce n'est qu'en 1833 que le Parlement vota une loi
d'émancipation qui devait permettre de libérer les esclaves
(dans les colonies britanniques) dans un délai de cinq ans. Par
ailleurs, la Grande-Bretagne incita d'autres pays comme l'Espagne à
signer des traités interdisant la traite.
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Pour plaider en justice, il faut nécessairement
faire appel à des principes, à des lois qui sont déjà
établies: les défenseurs de Cinque et de ses compagnons ne
pouvaient donc pas faire appel aux principes des droits de l'Homme dont
aucune convention n'avait été signée par les États-Unis
à cette époque (la Déclaration universelle des droits
de l'Homme date de 1948). Par ailleurs, si les esclaves fuyant le sud des
États-Unis trouvaient la liberté en arrivant dans le Nord
(on a signalé cependant au point 1 que le Connecticut était
encore à l'époque un État esclavagiste), l'accusation
portait sur des actes de «mutinerie», de «piraterie»
et d'assassinat qui étaient punissables quel que soit le statut
des accusés au moment des faits (un esclave pouvait fuir mais non
assassiner ses maîtres).
La défense des révoltés de l'Amistad a donc porté
sur l'infraction commise à l'égard de Cinque et de ses compagnons,
à savoir la traite, la mise en esclavage forcée qui alors
était seule interdite (même si ce n'est pas évoqué
dans le film, on signalera que l'accusation a essayé de démontrer
que Cinque et ses compagnons avaient été mis en esclavage
en Afrique même par des Africains, et qu'ils étaient donc
esclaves lorsqu'ils ont été embarqués sur le Tecora
puis l'Amistad, ce qui aurait permis de lever l'objection de la traite
forcée).
Enfin, si devant la Cour Suprême, John Quincy Adams évoque
les grands principes de la Déclaration d'Indépendance (qui
affirmait notamment que«tous les hommes sont créés
égaux» et qu'ils sont «dotés de certains droits
inaliénables, parmi lesquels la vie, la liberté et la recherche
du bonheur»), cette Déclaration n'a pas empêché
que l'esclavage ne subsiste aux États-Unis jusqu'à la guerre
de Sécession. Il faudra d'ailleurs ajouter un amendement à
la Constitution pour que l'esclavage puisse être aboli d'un point
de vue juridique.
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Dans le film, John Quincy Adams répond à
ses solliciteurs (dans le jardinet aux abords du Capitole) qu'ils doivent
«viser plus bas». Ces paroles sont sans doute à double
sens: soit ils doivent s'adresser à un défenseur moins prestigieux
que lui (ce qu'ils feront à la scène suivante), soit ils
doivent recourir à une argumentation basée non pas sur des
grands principes généraux (hostiles à l'esclavage)
mais sur des lois plus précises mais clairement établies.
Ce que fera l'avocat commercial Roger Baldwin lorsqu'il cherchera à
prouver que Cinque et ses compagnons ne sont pas des esclaves au sens juridique
du terme puisqu'ils ont été victimes de la traite illégale,
ce qui revient tout de même à accepter au moins temporairement
que l'esclavage soit une chose légale. On peut donc supposer que,
dans le film, John Quincy Adams pense qu'à ce stade de la procédure,
une argumentation «commerciale», purement juridique, sans recours
aux grands principes est la plus judicieuse.
En réalité, il semblerait qu'il fut néanmoins
associé très tôt à la défense des mutins
de l'Amistad, même s'il fut tenu en réserve jusqu'à
l'appel devant la Cour Suprême.
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Rien n'est dit dans le film des opinions esclavagistes
ou antiesclavagistes du président Van Buren: en revanche, on évoque
à plusieurs reprises les pressions exercées par les politiciens
du Sud qui redoutaient qu'une décision favorable aux mutins de l'Amistad
constitue une nouvelle étape vers l'abolition de l'esclavage. Van
Buren, en pleine campagne pour sa réélection, craignait donc
de mécontenter les électeurs sudistes alors que, dans l'ensemble
de l'opinion publique américaine (Nord et Sud confondus), les antiesclavagistes
restaient minoritaires. Le président se moque en revanche des demandes
de la reine d'Espagne qu'il traite notamment de «gamine prépubescente».
Dans les faits cependant, il semble que les pressions exercées
par ce pays (qui était alors une puissance mondiale) aient joué
un rôle non négligeable (bien qu'en fin de compte inefficace)
dans cette affaire.
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Dans le film, ce cahier est un morceau du carnet
de bord du Tecora sur lequel on a inscrit le nom africain des captifs auquel
on a grossièrement ajouté ensuite (à Cuba) un nom
espagnol. Ce carnet a ensuite été utilisé pour l'embarquement
de l'Amistad. Comme document, il montre indirectement que les esclaves
de l'Amistad ont été embarqués de force sur les côtes
africaines puis transférés sur l'Amistad à Cuba.
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À aucun moment, John Calhoun ne parle des
droits des Noirs ni de leur situation, comme si c'était une chose
qui ne se discute même pas. Il compare seulement la situation des
Blancs du Sud à celle de ceux du Nord: riche, prospère (c'est
le début de la révolution industrielle), le Nord n'a pas
besoin d'esclaves; en revanche, le Sud agricole a besoin d'une main-d'uvre
servile essentiellement pour ses plantations et craint donc de s'appauvrir
si l'on abolit l'esclavage.
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