Extrait du dossier pédagogique
réalisé par Les Grignoux et consacré au film
Blue
de Keith Scholey et Alastair Fothergill
États-Unis, 2018, 1 h 18
Les activités proposées dans ce dossier pédagogique réalisé par Les Grignoux et consacré au film Blue de Keith Scholey et Alastair Fothergill ont été conçues pour les enfants du premier cycle de l'enseignement primaire qui viendront voir Blue avec leur instituteur ou leur institutrice. Elles ont principalement pour objectifs de les amener à utiliser les souvenirs qu'ils ont gardés du film pour construire un petit savoir sur l'océan et la vie qu'il abrite (espèces vues, écosystèmes, chaînes alimentaires, comportements et apprentissages observés…), à apprécier la dimension esthétique du film ou encore à déceler la part de fiction qu'il recèle.
L'extrait ci-dessous est tiré de la cinquième partie du dossier intitulée «Un monde d'interactions».
Les espèces vues dans le film et décrites dans l'animation précédente entretiennent en leur sein ou les unes avec les autres des liens de nature différente. C'est à cet aspect que nous proposons de nous intéresser maintenant avec les enfants en les amenant à se remémorer, classer et organiser ces différents types d'interactions montrées dans Blue, de façon à construire, à partir du film, un petit savoir de nature scientifique.
Cette activité pourra être réalisée en grand groupe. Elle comportera néanmoins certaines phases de réflexion menées soit en petits groupes, soit individuellement. L'enseignant jouera ici le rôle de guide et consignera au fur et à mesure les propositions des élèves au tableau de la classe.
Invitons les enfants à se grouper par deux ou trois afin de recenser les interactions évoquées dans le film, en gardant sous les yeux l'ensemble des cartes rédigées au terme de l'activité précédente. Celles-ci pourront en effet jouer le rôle de déclencheurs dans l'exercice de remémoration. Désignons ensuite un porte-parole au sein de chaque groupe, qui fera part des interactions relevées à l'ensemble des élèves. Notons les observations au tableau de la classe, en complétant la liste au fur et à mesure des interventions.
Reprenons la réflexion en grand groupe et tâchons ensemble d'établir un classement de ces interactions en deux colonnes. L'intérêt principal de l'exercice est ici d'amener les enfants à identifier le critère le plus pertinent pour établir le classement, qui est certainement ici celui de l'appartenance des animaux impliqués dans l'interaction à une même espèce ou à une espèce différente de la leur. Si les enfants ne parviennent pas à identifier spontanément ce critère, n'hésitons pas à leur faire remarquer cette distinction importante : il y a des animaux qui entretiennent dans le film des relations avec les membres de leur propre espèce, et d'autres qui développent des relations avec des membres d'autres espèces que la leur.
Demandons ensuite aux enfants s'ils connaissent les termes « écosystème » et « éthologie ». Faisons le point sur ce qu'ils en savent éventuellement et, sur base de leurs connaissances antérieures, aidons-les à construire deux définition simples, qui pourraient ressembler à celles-ci :
L'éthologie, c'est la science qui observe et étudie le comportement des animaux dans leur milieu naturel. |
Un écosystème est un ensemble composé d'un environnement et de toutes les espèces qui s'y nourrissent, s'y abritent et s'y reproduisent. Ainsi, en regardant Blue, nous découvrons l'écosystème corallien. Tous les hôtes d'un même écosystème vivent en communauté et développent entre eux et avec leur habitat des interactions de toutes sortes (prédation, symbiose, coopération, mutualisme…). Dans un écosystème, les plantes sont désignées en tant que producteurs (ici, les algues) et les animaux en tant que consommateurs. |
Divisons alors la classe en deux et confions à chaque moitié un exercice différent selon que les relations observées entre les animaux se développent ou non au sein d'une même espèce. Le premier groupe s'attachera à mener une petite étude éthologique tandis que le second entreprendra de reconstituer par un schéma ou un dessin ce que l'on apprend de l'écosystème marin dans le film Blue. Pour de jeunes enfants, organiser de cette manière toutes les informations contenues dans le film nous semble en effet largement suffisant, au moins dans un premier temps. Si les enfants ont manifesté de l'intérêt pour l'activité, ils pourront toutefois consulter internet pour compléter le schéma en cherchant de nouvelles espèces ou de nouvelles interactions à intégrer à la représentation.
En guise de commentaire, voici une manière parmi d'autres de faire progresser la réflexion. L'enseignant pourra éventuellement s'y référer pour alimenter la discussion entre les enfants ou compléter leurs observations.
L'étape suivante aura peut-être permis d'identifier un critère de classement important, l'espèce ou les espèces concernée(s) par chacune des interactions :
On pourrait donc obtenir un classement semblable à celui-ci :
Un exemple de classement des interactions observées | |
Au sein d'une même espèceDauphins :• Relation mère/petit très forte (sensibilité, affection, protection, contacts physiques) ; Baleines à bosse :• Relation mère/petit très forte (sensibilité, affection, protection, contacts physiques) ; |
Entre espèces différentes• Les poissons et les tortues vertes élaguent le massif corallien. |
Dans Blue, les relations observées entre membres d'une même espèce concernent exclusivement les baleines et les dauphins : deux cétacés qui appartiennent à l'ordre des mammifères aquatiques, plus spécifiquement des mammifères marins. Comme le commentaire nous l'apprend au début du film, les dauphins, comme les baleines, vivaient autrefois sur la terre ferme, il y a de cela plusieurs millions d'années. Depuis lors, ils se sont adaptés à la vie sous l'eau tout en conservant quelques caractéristiques propres aux animaux terrestres.
Tout d'abord, contrairement aux poissons qui captent l'oxygène de l'eau grâce à des branchies, les baleines et les dauphins sont dotés de poumons et doivent régulièrement remonter à la surface pour respirer. Ils peuvent rester en apnée pendant des périodes plus ou moins longues qui peuvent aller, selon les espèces, jusqu'à deux heures. L'organe qui leur permet de respirer présente la forme d'un orifice à clapet situé sur le haut du crâne. Il s'agit d'une sorte de narine appelée « évent » : celui-ci s'ouvre pour laisser passer l'air et se referme au moment où l'animal plonge sous l'eau. À plusieurs reprises dans Blue, nous voyons ces animaux remonter à la surface et rejeter l'air inspiré sous forme d'un jet puissant d'air chaud contenant de la vapeur d'eau. Comme la respiration n'est pas un réflexe pour les dauphins, une seule partie de leur cerveau s'endort, ce qui leur permet de garder un œil ouvert et de remonter à la surface pour respirer pendant leur sommeil.
Une autre grande caractéristique qui permet de distinguer les mammifères marins des poissons a trait à la naissance des petits : alors que les poissons pondent des œufs, les dauphins et baleines femelles portent leurs petits dans leur ventre et, comme tous les autres mammifères, les allaitent à la naissance, développant vis-à-vis d'eux une relation affective très forte qui fait intervenir les contacts physiques. Nous le constatons ainsi dans le film avec les couples inséparables que forment la baleine à bosse et son baleineau ou encore le grand dauphin et son petit, Blue. Entre autres, les mères les protègent des prédateurs, avec l'aide des mâles de leur groupe. Ainsi, par exemple, lorsqu'un danger menace le baleineau – l'approche des orques par exemple –, la mère émet des signaux de détresse en frappant la surface de l'eau à l'aide de ses nageoires pectorales. Les mâles y répondent de la même façon et se rassemblent pour contrer les orques. Après un âpre combat, l'un d'eux devient le protecteur du baleineau et accompagne la mère et son petit dans les eaux profondes. En attendant, le baleineau se protège en s'accrochant au dos de sa mère. Si le mâle protecteur ne parvient pas à se défaire des orques, il appelle à l'aide, toujours à coups de nageoires, les autres mâles qui étaient ses adversaires lors du combat pour la prise en charge du baleineau et tout le groupe s'allie et coopère pour mettre les adversaires en fuite. On observe un comportement semblable chez les dauphins qui, eux sont organisés en groupes rivaux : lorsque les mâles d'un groupe rival s'en prennent à une femelle et à son petit, les mâles de leur propre groupe s'allient immédiatement pour les défendre.
Comme les baleines, qui communiquent entre elles en frappant la surface de l'eau à l'aide de leurs nageoires pectorales ou encore grâce au « chant de la baleine » propre aux mâles, les dauphins connaissent eux aussi un langage complexe fait de cris et de claquements. Des chercheurs parlent même de similitude avec le langage humain. L'observation des échanges sonores entre deux dauphins en captivité a révélé par ailleurs qu'ils s'exprimaient l'un après l'autre, comme s'ils s'écoutaient sans « se couper la parole » avant de « répondre ». D'autres recherches ont encore mis en évidence une différence entre les sons émis par les dauphins dans le cadre de l'écholocation liée à la recherche de nourriture et ceux produits pour communiquer entre eux.
Mais la relation mère/petit observée chez les dauphins se trouve également dans le film au cœur des apprentissages transmis de l'un à l'autre. Nous observons ainsi comment la mère montre à son petit comment faire pour localiser ou piéger des proies. Avec sa mère, Blue apprend à explorer les bancs de sable et à localiser les proies qui s'y trouvent enfouies grâce à l'écholocation (ou écholocalisation), une méthode qui consiste à produire des sons et à écouter leur écho pour identifier les obstacles et les proies qui se trouvent dans son environnement. Dans le film, on le voit développer l'écholocation en jouant avec les pierres et les coquillages et localiser des labres rasoirs enfouis dans les fonds vaseux.
Plus tard, sur les bords d'une plage isolée, Blue apprend à piéger le poisson. Sa mère commence par une démonstration de nage rapide en glissant à grande vitesse à la surface de l'eau, une technique qui permet de dérouter le poisson et de l'amener où elle veut. Une fois la leçon assimilée, elle l'entraîne dans les hauts fonds recouverts de vase pour lui apprendre à pratiquer la nage rapide en rond afin de créer un nuage de vase circulaire qui piégera le poisson. Sans issue, les poissons sautent hors de l'eau pour retomber au-delà du cercle de vase et c'est à ce moment-là, lorsqu'ils sont en plein «vol», que les dauphins en profitent pour s'en saisir.
Enfin, Blue apprend à se soigner (de ses éventuelles blessures, morsures ou infections) en frottant son corps à la gorgone, une espèce de corail mou qu'on ne trouve qu'en certains endroits du récif et qui possède de nombreuses vertus médicinales.
Les indices environnementaux du film nous indiquent que les images ont été tournées dans les eaux tropicales – la baleine à bosse vient de mettre au monde son petit : elle a donc migré depuis les eaux de l'Antarctique – à proximité d'un groupe d'îlets et donc de plages aux abords desquelles s'ébattent et pêchent les dauphins. Tout ce milieu est propice à la découverte des récifs coralliens qui se déploient habituellement dans ce type d'eaux peu profondes. Voici un exemple de représentation possible de cet écosystème tel qu'il est évoqué dans Blue.
[Cette représentation graphique est visible dans le dossier pédagogique imprimé.]