Extrait du dossier pédagogique
réalisé par les Grignoux et consacré au dessin animé
Les Enfants loups, Ame & Yuki
de Mamoru Hosoda
Japon, 2012, 1 h 57
À l'université où elle étudie, Hana tombe amoureuse d'un beau et mystérieux jeune homme. Au moment où leur relation devient solide, le garçon révèle son secret à Hana: il est le dernier descendant d'une lignée d'hommes-loups. Hana accepte cette différence, le jeune couple s'installe et bientôt naît une petite fille, Yuki, puis, un peu plus tard, un garçon, Ame. Celui-ci n'est encore qu'un bébé quand son père disparaît brutalement. Hana se retrouve seule pour élever deux enfants loups! Elle va faire le choix audacieux de les laisser vivre dans le respect de leur nature profonde.
Film d'animation japonais, Les Enfants loups, Ame & Yuki raconte une histoire très touchante avec beaucoup de pudeur et de sensibilité. Si la dimension fantastique est au centre du récit, tout le contexte est rendu avec beaucoup de réalisme, ce qui n'est pas si courant dans les films destinés au jeune public. Le caractère fantastique du récit est plutôt au service d'une réflexion qui porte sur différents aspects de la vie: la difficulté d'élever des enfants; le respect de l'autre; les choix que l'on fait au cours de l'existence; le travail et l'étude qui sont nécessaires pour accomplir toutes sortes de choses…
Le dossier pédagogique consacré à ce dessin animé propose aux enseignants en charge d'enfants à partir de huit ans de commenter et d'interpréter le film, de revenir sur certains de ses thèmes ainsi que sur les particularités géographiques et culturelles du Japon.
L'extrait ci-dessous s'attache plus précisément à la double nature des personnages — humaine et animale — et aux différentes interprétations que l'on peut donner à cette dimensoin fantastique.
La double nature, mi-être humain mi-loup, du père des enfants, et dont ceux-ci vont hériter, est évidemment au centre du récit. Cette double nature fait l'objet d'un secret qui ne doit pas être révélé, raison pour laquelle Hana va aller s'installer dans un coin isolé de la campagne.
Dans la plupart des récits qui mettent en scène des êtres dotés d'une double nature (comme les loups-garous ou les sirènes), cette caractéristique est à prendre comme une métaphore des traits de caractère ou des passions qui peuvent tirailler tout un chacun ou encore de la double nature de l'homme: corporelle et spirituelle… Le destin de ces créatures est souvent tragique, avec l'obligation de faire un choix déchirant, ou au contraire, l'impossibilité de faire un choix…
Cette dimension métaphorique n'est sans doute pas facile à aborder avec des enfants. Pourtant, il est possible de s'intéresser avec eux à la double nature humaine: nous sommes à la fois des êtres capables de réfléchir, de créer et d'inventer, mais il y a aussi en nous une part «animale» qui a besoin de manger, de se reposer, et qui éprouve des émotions parfois incontrôlables…
Invitons d'abord les enfants à commenter les transformations des deux enfants ou de leur père, avec des questions comme:
Ensuite, on pourra demander aux enfants s'il leur arrive à eux aussi d'avoir des réactions incontrôlables… Dans quelles circonstances? Avec quel effet?
Les enfants loups et leur père peuvent se transformer en loup à volonté, quand ils le désirent, par exemple pour révéler le secret de leur double nature, comme le fait l'homme loup avec Hana et comme le fait Yuki avec Sohei à la fin du film, quand ils sont seuls pendant la tempête… Ils se transforment également par choix pour laisser libre cours à leur nature de loup: pour courir dans la nature, «jouer» avec d'autres animaux, ou chasser…
Mais il leur arrive aussi de se transformer sans véritablement l'avoir décidé, comme si leur nature de loup prenait le dessus: c'est le cas quand la petite Yuki se met en colère, parce qu'elle a faim, par exemple, ou qu'elle se trouve tout à coup face à un chien qui aboie, ou encore quand Sohei la poursuit dans l'école et qu'elle se trouve finalement acculée dans une impasse! Tout se passe comme si la nature de loup était plus forte que la raison humaine. Le même phénomène se produit quand Ame, au bord de la rivière, voit un oiseau et se précipite pour l'attraper! Il n'a sans doute pas décidé de s'en prendre à l'oiseau, c'est son instinct de loup qui l'a poussé à faire ce mouvement.
En grandissant, les enfants maîtrisent de mieux en mieux leur instinct et leur transformation. Yuki ne se transforme plus en loup, et seulement pour quelques secondes, que lorsqu'elle se sent harcelée par Sohei.
Ainsi la nature «loup» des enfants correspond en quelque sorte à un instinct, qui s'oppose parfois à la raison humaine.
Invitons ensuite les enfants à une réflexion personnelle autour de la question suivante:
Si toi, tu avais une double nature, mi-humain, mi-animal, quel animal ferait partie de ta nature?
Pour répondre à cette question, on pourra proposer aux enfants qu'ils définissent d'abord dans quel environnement chacun se sent bien: sur terre? dans l'eau? dans les airs? On pourra formuler cette question différemment, par exemple:
Tu pourrais passer le plus de temps en observant:
Il s'agira ensuite de définir un «style» de caractère: es-tu plutôt timide ou extraverti? rapide ou lent? calme ou toujours en mouvement? aventurier ou prudent? réfléchi ou impulsif? etc.
Quel animal correspondrait bien à ton caractère?
On invitera ensuite chaque enfant à dire: «si j'avais une double nature, je serais aussi …», et à expliquer pourquoi l'animal choisi correspond à sa personnalité.
Dans cet exercice d'expression personnelle, il sera très important de respecter la parole de chacun et de ne pas tolérer les moqueries. Chaque trait de caractère présente des avantages et des inconvénients, même si certains sont plus valorisés que d'autres.
On pourra notamment évoquer le fait que, du frère et de la sœur, c'est a priori le plus timoré, le plus timide, le plus rêveur qui va choisir de devenir un loup, donc un animal sauvage et potentiellement dangereux, mais aussi en quelque sorte le «maître» de la forêt; alors que Yuki, plus aventurière, plus remuante, va choisir de grandir en jeune femme, étudier, et donner la priorité à la raison et à la culture… Ainsi, les personnes ne se conforment pas toujours à l'impression qu'elles donnent. Il vaut mieux éviter de juger sur les apparences.
On ne peut pas réduire quelqu'un à l'image que l'on se fait de lui. Celui qui regarde et qui juge peut se tromper, et celui qui est regardé peut changer.
Par exemple: