En fait, ils parlent de...
Voici quelques commentaires sur les répliques du film. Les termes qui font l'objet d'une définition sont notés en gras: les astérisques à d'autres endroits du texte renvoient à ces différentes définitions.
- Le titre en question désigne très vraisemblablement une action cotée en Bourse. Une action est un droit de propriété d'une entreprise ou de façon plus concrète une part du capital de cette entreprise: l'ensemble des actionnaires sont donc les propriétaires de l'entreprise (toutes les entreprises ne sont cependant pas des sociétés à actions). Ces actions rapportent en principe à leurs propriétaires un revenu annuel appelé le dividende. Mais elles peuvent également être revendues à d'autres personnes ou institutions à un prix variable qui dépend essentiellement de la «bonne santé» de l'entreprise.
Parmi les sociétés à actions, certaines seulement sont cotées en Bourse: la Bourse (généralement située dans une grande ville: Paris, Bruxelles, Londres, New York...) est un marché où l'on échange des titres financiers (actions ou autres). L'ensemble des offres d'achat et de vente pour un même titre permet de déterminer sa cote, c'est-à-dire son prix moyen [1] à un moment donné. La cote d'une action peut donc varier de jour en jour, et on mesure cette variation (le cours) en pourcentage: dans le cas évoqué par cette réplique du film, l'action a perdu 2% de sa valeur par rapport au jour précédent, c'est-à-dire qu'elle ne trouvera preneur qu'à 98% de son prix d'hier ou à un prix encore inférieur. (Cette réplique est dite par un des banquiers.)
- Le Conseil dont il est ici question est certainement le Conseil d'Administration (ou CA) de l'entreprise cotée en Bourse: le CA est chargé par l'Assemblée générale des actionnaires de gérer ou d'administrer l'entreprise. Lorsque celle-ci est de grande taille, le CA ne s'occupe généralement que des grandes orientations et charge une direction de la gestion quotidienne de l'entreprise. Les membres du CA (leur nombre peut varier de trois personnes à plus d'une dizaine de personnes) sont en particulier attentifs à la santé financière de l'entreprise: ils ont notamment connaissance des comptes annuels avant leur présentation devant l'assemblée générale des actionnaires, et ils sont donc bien placés pour utiliser des informations confidentielles de façon illicite (en commettant donc un délit d'initié). (Cette réplique est également dite par un des banquiers.)
- Blue Mineral est une firme dont les actions sont cotées en Bourse. Comme ses profits sont censés augmenter grâce à une bonne nouvelle inattendue, le cours de l'action (c'est-à-dire son prix moyen) va certainement monter, de 25 à 30% selon le banquier qui parle. On remarquera que, si le principe d'une telle valorisation est logique, son importance est certainement surestimée dans le film: le cours quotidien des actions (donc au jour le jour) varie généralement de quelques pour cent et souvent de quelques dixièmes de pour cent à peine; les écarts les plus importants se situent généralement entre 5 et 10%. En outre, les autorités boursières limitent les écarts de cours sur le marché, notamment pour limiter les effets d'un krach: ainsi, un titre ne peut pas varier plus de deux fois de plus de 10% au cours d'une même séance par rapport à son cours de la veille (la variation peut atteindre 21% en valorisation et 19% en dépréciation). Les scénaristes du film ont donc exagéré le renchérissement du titre pour rendre le mécanisme plus évident, mais une telle variation n'est pas possible, du moins en un seul jour. Bien entendu, elle pourrait s'étaler sur une période plus longue.
- La Bourse est régie par certaines règles dont l'une implique que les investisseurs (notamment les actionnaires) reçoivent la même information et reçoivent une information honnête. Comme on le comprend facilement dans le film, celui qui dispose d'informations confidentielles avant les autres jouit d'un avantage illégitime puisqu'il peut vendre ou acheter en prévoyant avec une grande certitude le cours futur de l'action. Le fait de disposer de telles informations n'est pas en soi un délit (un dirigeant d'entreprise est nécessairement au courant de certaines choses avant d'autres personnes, même actionnaires), mais en profiter pour faire un bénéfice (ou éviter une perte) constitue effectivement un délit d'initié.
La manipulation du cours est une manœuvre consistant à créer une hausse ou une baisse artificielle en induisant les autres investisseurs en erreur notamment par un achat ou une vente massive de titres. Dans ce cas, ce n'est pas l'achat ou la vente qui est en cause mais la tromperie qui lui est associée: que ce soit par une transaction importante ou par de fausses rumeurs, on essaie d'influencer les autres investisseurs ainsi que le cours du titre en cause. (Cette réplique est également dite par le jeune banquier qui débute et qui est encore fort naïf.)
- L' est l'acronyme de l'Union de Recouvrement des Cotisations de Sécurité Sociale et d'Allocations Familiales. Il s'agit d'un organisme chargé en France de la collecte des cotisations salariales et patronales destinées à financer le régime général de la Sécurité sociale. Qu'est-ce que cela signifie? Le salaire d'un employé est composé de deux parties: d'une part, le salaire net qui lui est versé en général à la fin du mois sur son compte bancaire, et, d'autre part, une série de cotisations destinées à financer la Sécurité sociale dont il peut un jour ou l'autre être bénéficiaire (assurance contre le chômage, les accidents, les maladies, pensions de vieillesse ou d'invalidité, etc.). L'employeur doit lui aussi verser pour chaque salarié des cotisations (dites patronales) pour financer la Sécurité sociale. Le mode de calcul de ces différentes cotisations est relativement complexe, et ce travail est à la charge du patron (ou de son service de comptabilité) qui doit ensuite verser les sommes dues à l'Urssaf.
Cette réplique qui est dite par Étienne, l'ami de Julien Foucault, traduit donc le fait que ce travail de comptabilité est complexe et source de nombreux soucis (l'Urssaf poursuit évidemment les patrons mauvais payeurs). On remarquera que l'Urssaf n'a rien à voir (directement) avec le monde financier: il s'agit d'une institution économique et sociale.
- L'Autorité des Marchés Financiers est en France un organisme public indépendant qui réglemente et contrôle les marchés financiers et en particulier la Bourse. Elle doit veiller notamment à ce que les sociétés cotées en Bourse informent de façon exacte et honnête l'ensemble des investisseurs: elle doit donc vérifier qu'il n'y a pas de possibles délits d'initié ou manipulations des cours. Si des manquements ou des infractions sont avérés, elle peut prendre des sanctions ou transmettre l'information au Parquet (à la Justice) si les faits paraissent constituer un délit. C'est Alban, le jeune subordonné naïf, qui évoque dans le film l'Autorité des Marchés, mais les autres banquiers ne semblent pas s'inquiéter de son rôle de surveillance.
- Lors de la réception dans sa propriété à la campagne, le banquier d'Espinasse félicite un de ses employés qui a fait des résultats à deux chiffres... De quoi s'agit-il? L'employé en question est vraisemblablement ce que l'on appelle un trader (ou un opérateur de marché) chargé par la banque de faire fructifier un capital (donc une somme d'argent plus ou moins importante) par une série d'achats et de ventes de titres: au bout d'un an (ou de toute autre période de temps), on calcule alors le bénéfice de ces transactions rapporté au capital de départ, ce qui donne le pourcentage du bénéfice. Ce pourcentage peut être à 1 chiffre de 0 à 9% ou à deux chiffres de 10 à 99% ou même à trois chiffres au-delà de 100%, ce qui est évidemment exceptionnel . Depuis quelques années, des «résultats à deux chiffres» sont souvent désignés comme des résultats à atteindre à tout prix: il faut cependant comparer de tels chiffres aux intérêts d'un compte d'épargne (entre 1 et 5%, tout au plus) et à la croissance de l'économie mondiale (3,7% en 2007, 1,9% en 2008, -2,9% en 2009) qui est censée «alimenter» de façon directe ou indirecte les marchés financiers...
- La banque Berthin-Schwartz ne prête pas aux particuliers: autrement dit, elle ne traite qu'avec des entreprises (ou éventuellement des institutions ou des organismes de toutes sortes). C'est ce qu'on appelle une banque d'affaires. Elle est chargée par ces entreprises des opérations financières importantes, complexes et de grande envergure comme par exemple l'acquisition d'une autre entreprise ou bien l'émission d'actions en Bourse. Sauf exception, elle ne prête donc pas d'argent aux entreprises et joue le rôle de conseiller et d'intermédiaire notamment dans l'acquisition (ou la prise de participation, c'est-à-dire une acquisition partielle) pour ses clients d'autres sociétés: c'est ce que l'on voit dans le film avec les négociations autour du rachat de la société de camions de M. Lebrun que la banque Berthin-Schwartz veut vraisemblablement racheter pour le compte d'un promoteur immobilier. Elle touchera bien sûr une commission sur cette transaction (si elle réussit...). Les banques d'affaires sont généralement mal connues du grand public puisqu'elles ne s'adressent pas aux particuliers. (C'est le banquier d'Espinasse qui répond ainsi à la demande de prêt de Julien.)
- Les taux désignent les intérêts que rapporte annuellement une somme placée dans une banque ou au contraire qu'un emprunteur doit payer à la banque pour un prêt. Comme la somme est évidemment variable selon les clients, ces intérêts sont présentés sous forme de pourcentage de la somme investie ou empruntée. Pour un emprunteur, plus le taux (c'est-à-dire le pourcentage) est élevé, plus il doit payer d'intérêts. Inversement, pour celui qui place de l'argent en banque, plus le taux est élevé, plus il y gagne (pour autant que l'inflation* reste la même). Bien entendu, une banque prête à des taux plus élevés (par exemple, en 2009, l'emprunt hypothécaire* à un an se situait autour de 5%) que ceux qu'elle accorde à ses clients détenteurs d'un compte d'épargne par exemple (aux alentours de 2% la même année). (C'est M. d'Espinasse qui donne ce conseil.)
- Lorsqu'un client emprunte de l'argent à une banque, celle-ci court le risque que l'emprunteur ne soit pas capable à un moment ou l'autre de rembourser la somme empruntée ainsi que les intérêts. Les banques demandent donc surtout quand la somme est importante des garanties. Dans le cas de l'achat d'une maison par exemple, celle-ci sert de garantie à la banque qui, en cas de défaut de paiement, pourra vendre la maison et être remboursée sur le prix de cette vente (c'est ce qu'on appelle un crédit hypothécaire). Dans le cas de mise sur pied d'un commerce, comme le restaurant d'Étienne et Julien, les garanties sont plus difficiles à obtenir, car ils ne sont vraisemblablement pas propriétaires des lieux mais seulement locataires; par ailleurs, tout le matériel d'un restaurant a peu de valeur à la revente même s'il est relativement coûteux à l'achat. On peut donc comprendre que la banque soit réticente à faire un prêt pour une entreprise risquée.
- Le capital, c'est de l'argent, mais n'importe quelle somme d'argent ne constitue pas un capital... En économie, le capital désigne un ensemble de richesses qui ne sont pas immédiatement consommées (contrairement à la crème glacée par exemple...) et qui sont utilisées pour produire d'autres richesses et générer de nouveaux revenus. Dans le cas du restaurant d'Étienne et Julien, il s'agit des tables, des chaises, des fourneaux, de la vaisselle, des denrées nécessaires à la bonne marche de l'établissement. Bien entendu, tout cela, Étienne et Julien devront l'acheter grâce à un capital de départ, qu'ils le possèdent en propre ou qu'ils l'empruntent auprès d'un banquier. D'un point de vue financier, le capital désigne alors l'investissement de départ une somme d'argent plus ou moins importante qu'on distingue des revenus qu'il va générer (qu'on peut désigner comme la plus-value, l'intérêt, le profit, le rendement financier...). (Cette réplique et la précédentes sont dites par Gilbert, l'employé de la petite agence bancaire).
- L'employé de banque, Gilbert, propose à Étienne et Julien un produit financier (sans doute une sicav) censé être avantageux et rapporter plus qu'un simple carnet d'épargne. Mais sa «progression» de 2% (c'est-à-dire son rendement) est inférieur, comme le remarque Étienne, à l'inflation de 4%.
Mais qu'est-ce que l'inflation? L'inflation désigne l'augmentation des prix qui varie selon les produits, les périodes et les monnaies. Pour augmenter ou conserver leurs marges bénéficiaires, les entreprises et les commerces augmentent en effet à intervalles plus ou moins réguliers leurs prix, puis les salariés, qui voient les prix augmenter, demandent à leur tour (généralement à travers leurs organisations syndicales) des augmentations. L'inflation cette augmentation des prix est en fait mesurée à travers un panel de produits supposés être représentatifs de la consommation moyenne des ménages: il s'agit donc toujours d'une estimation qui peut faire l'objet de contestations. Dans les pays occidentaux, elle est de quelques pour cent par an, mais, dans certains pays en difficulté et/ou à certaines périodes, elle peut dépasser les 10% et parfois les 100% (on parle alors d'hyper-inflation).
Le produit financier proposé par l'employé de banque est donc en fait peu avantageux puisque la somme investie aura, à la fin de l'année, moins de valeur qu'au début malgré sa «progression» de 2% (si elle avait conservé sa valeur malgré l'inflation, la somme devrait atteindre 104%, et non 102%: l'investisseur aura donc perdu au final un peu moins de 2% de la somme investie). De manière générale, les produits financiers aux revenus garantis (comme les carnets d'épargne) offrent un revenu à peine supérieur (et à certaines périodes inférieur) à la perte due à l'inflation. Pour obtenir des taux nettement supérieurs à l'inflation, il faut alors se tourner vers d'autres produits, comme les actions, mais plus risqués...
- Les sicav (Sociétés d'Investissement à CApital Variable) sont des sociétés qui achètent une variété de produits financiers comme des actions. Elles-mêmes émettent des actions (que par facilité on appelle également des sicav) qui sont vendues à des investisseurs intéressés, notamment des particuliers. Comment cela fonctionne-t-il concrètement? Acheter une action ou un lot d'actions d'une entreprise constitue un risque important car il est difficile d'estimer la santé financière future de l'entreprise: celle-ci peut à la fin de l'année ne pas verser de dividendes, alors que le prix de l'action peut par ailleurs baisser, entraînant une perte pour l'investisseur qui voudrait revendre son lot. Il est alors possible de diminuer le risque en achetant une grande variété d'actions, car les pertes des unes peuvent être compensées par les gains des autres. Cela implique cependant d'augmenter considérablement son investissement initial, ce que tout le monde n'est pas capable de faire. Les sicav permettent précisément de tourner cette difficulté, car ce sont des organismes de placement collectif: elles regroupent les investissements de plusieurs personnes qui, comme actionnaires, reçoivent les parts d'un panier d'actions ou d'autres titres financiers (comme des obligations qui sont des formes d'emprunts émis par des entreprises ou par des États, payables à terme mais pouvant aussi être revendus à d'autres acquéreurs).
Les sicav sont apparues à la fin des années 1960 pour répondre à la demande d'outils financiers plus rentables de la part de nombreux particuliers déçus par le faible rendement des comptes d'épargne traditionnels (rabotés par l'inflation) mais peu désireux de prendre le risque d'investir directement en Bourse. La souscription à une sicav implique cependant des frais d'entrée, auxquels il faut ajouter des frais de gestion annuels et des frais de sortie (c'est-à-dire quand on veut revendre la sicav).
La sicav AsiaTech dont parle Gilbert est censée par ailleurs profiter de la croissance importante du secteur technologique en Asie.
- La réaction de l'employé de banque est ici un peu curieuse, car n'importe qui peut en principe investir en Bourse, et les banques servent notamment d'intermédiaires pour de tels investissements (même si elles-mêmes doivent passer par ce qu'on appelle des sociétés de bourse, seules habilitées à intervenir directement sur le marché). La banque se voit d'ailleurs verser une commission (des «frais de courtage») à chaque ordre émis par le client. On doit donc supposer que la banque préfère placer auprès de ses clients (souvent mal informés) ses propres produits financiers plutôt que d'agir ici comme intermédiaire.
- Sur un marché boursier soumis entièrement à la loi de l'offre et de la demande, rien n'est jamais réellement solide: la phrase dite ici par le banquier signifie sans doute qu'il lâche une action ChimiCorp pour racheter 10% des parts d'UltraMarine (et en prendre ainsi vraisemblablement le contrôle).
- Ce qui va grimper ici, c'est très certainement la cote de l'action BMGM (c'est du moins ce que les banquiers ont fait croire à Julien). De façon générale, les investisseurs en Bourse sont moins intéressés par les dividendes éventuellement versés (souvent ils ne le sont pas) que par la cote de l'action, c'est-à-dire son prix de revente, qui dépend entièrement de l'équilibre de l'offre et de la demande de cette action en Bourse.
- En France, un PEL est un Plan Épargne Logement, à savoir un compte d'épargne sur une période de quatre à dix ans en vue de l'obtention d'un crédit hypothécaire à taux préférentiel. Ce type de produits s'adresse à des clients relativement peu fortunés qui souhaitent acquérir leur premier logement. Ici, la remarque de Gilbert sonne de manière comique alors qu'il est en train de jouer des sommes très importantes en Bourse, ce qu'il masque à son directeur d'agence en parlant de deux PEL. Il ne faudrait cependant pas croire que ce genre de produits est négligé par les banques, car si les montants sont (relativement) peu importants, leur très grand nombre justifie le nombre d'agences ouvertes partout sur le territoire.
- Un krach se produit lorsque la cote de la plupart des titres cotés en Bourse (notamment des actions) s'effondre: cela se produit quand il y a beaucoup plus de vendeurs que d'acheteurs, et que les titres à la vente ne trouvent pas preneurs, même à bas prix. Un krach survient généralement après une période de forte croissance où les titres boursiers font l'objet d'une forte demande, ce qui engendre une «flambée» des cours (de la cote des différents titres) et une «bulle spéculative». Le krach résulte d'un mécanisme inverse, où une baisse des cours entraîne une panique au cours de laquelle un grand nombre d'investisseurs veulent se débarrasser des titres en leur possession. Mais en voulant vendre, selon la loi de l'offre et de la demande, ils accentuent la baisse des prix qui se transforme alors en chute brutale.
Le krach boursier le plus célèbre est celui de la Bourse de New York qui débuta le jeudi 24 octobre 1929 (le «jeudi noir») et qui devait entraîner la grande dépression des années 30. On raconte que des spéculateurs ou des banquiers se seraient alors suicidés en se jetant par la fenêtre, mais il semble bien qu'il s'agisse là d'une légende. D'autres krachs boursiers se sont produits plus récemment en octobre 1987 et en en avril 2000 (éclatement de la «bulle Internet» suscitée par l'engouement pour les entreprises à la pointe du développement de ce nouveau réseau). Ces deux krachs n'ont cependant pas entraîné à leur suite de crise économique générale. (La réplique est dite, on s'en souvient certainement, par un client du bar où travaille Étienne.)
- C'est le patron de l'entreprise de camions qui s'inquiète ici de l'avenir de son entreprise. On doit supposer que son entreprise est cotée en Bourse : c'est ainsi qu'Étienne avec la complicité de Gilbert pourra racheter 5,1% de ses actions (ce qui représente dans le film 40800 titres à 75 euros...). Le banquier quant à lui souhaite racheter toutes les parts et faire sortir l'entreprise de la cote boursière: il aurait alors les mains libres pour ses projets immobiliers, ce que redoute, à juste titre, le patron. (Il paraît cependant étonnant que la banque doive acquérir 95% des parts pour «éliminer les petits actionnaires récalcitrants» comme l'affirme Julien: en ayant la majorité à l'assemblée générale des actionnaires, elle pourrait en effet déjà imposer sa politique, et, en ayant plus de deux tiers des parts, elle éliminerait toute minorité de blocage qui, avec un tiers des voix pourrait encore interdire une modification importante des statuts de l'entreprise. Le film n'apporte pas d'éclaircissements sur ce point.)
- La FED (Federal Reserve System ou Réserve Fédérale) est la Banque centrale des États-Unis. Une banque centrale est une institution chargée par l'État (ou un ensemble d'États comme en Europe dans la zone euro) d'émettre de la monnaie (des dollars aux États-Unis, des euros en Europe, des yens au Japon...). La plupart des banques centrales jouent également le rôle de prêteur en dernier recours aux autres banques du pays concerné. Cette dernière fonction est très importante, car chaque banque centrale détermine son taux directeur, c'est-à-dire le taux (fixé au jour le jour) auquel elle prête de l'argent aux autres banques (qui, bien sûr, vont répercuter ce taux, avec une petite marge, sur leurs clients). Si la FED augmente son taux directeur, les entreprises vont devoir payer plus cher pour emprunter de l'argent (par exemple pour leurs investissements), ce qui peut nuire évidemment à leur rentabilité et donc faire baisser la valeur de leurs actions. Par ailleurs, si les taux d'intérêt augmentent, il peut devenir plus intéressant de prêter son argent à un taux élevé plutôt que de l'investir en Bourse notamment dans des actions dont la demande et le cours vont alors baisser. Cependant, l'effet est loin d'être mécanique, et beaucoup d'autres facteurs influent sur le cours des actions. Mais les spécialistes de la Bourse sont évidemment très attentifs à cette donnée. Julien, à qui s'adresse la remarque, n'a en revanche sans doute pas d'avis sur la question...
- La Cour des Comptes est en France une juridiction financière chargée de vérifier (comme son nom l'indique) la régularité des comptes de l'État, de toutes les administrations et de tous les organismes publics ou parapublics. Cette Cour, en principe indépendante, peut émettre des critiques et faire des recommandations (à travers les rapports qu'elle publie régulièrement) et transmettre éventuellement aux autorités administratives ou judiciaires compétentes les infractions constatées.
De façon moins formelle, on peut dire que la Cour des Comptes se présente comme un organisme composé de «sages» échappant aux pressions de la vie politique ordinaire et capables dès lors de défendre en toute indépendance l'intérêt général à long terme. Mais, de façon plus critique, d'autres soulignent comme le fait cette réplique du film le passage de hauts responsables du secteur privé (les entreprises) au secteur public (les institutions étatiques comme la Cour des Comptes) ou inversement: ici, le dirigeant de l'entreprise en cause retourne à la Cour des Comptes, ce qui implique qu'il y était déjà avant son passage dans le privé. Même si de tels allers-retours ne sont pas formellement condamnables, ils sont souvent critiqués comme des exemples de la confusion néfaste entre la sphère privée (les entreprises) et la sphère publique (l'État), confusion qui serait particulièrement importante en France. Les banquiers du film semblent en revanche trouver cela normal...
- Jusqu'il y a peu les Hedge Funds étaient pratiquement inconnus du grand public, mais différents scandales les ont mis sur le devant de la scène où ils ont acquis une bien mauvaise réputation.
Mais de quoi s'agit-il exactement? Il s'agit de fonds d'investissement collectifs qui proposent à leurs clients de faire fructifier leur argent dans des placements spéculatifs (en principe très rentables mais risqués) en jouant notamment sur l'importance des sommes ainsi recueillies. Par rapport à d'autres formes d'investissement collectif (comme les sicav), il y a deux différences importantes.
D'abord, le droit d'entrée (c'est-à-dire la somme à investir au départ) est beaucoup plus important, les Hedge Funds ne s'adressant qu'à des clients très fortunés ou à des institutions financières (comme des banques). Par ailleurs, les Hedge Funds proposent une gestion «alternative» de ces investissements, ce qui veut dire sans relation directe avec le marché boursier des actions et obligations contrairement par exemple à celle des sicav. La valeur des sicav, qui sont des «paniers» d'actions (ou d'obligations), a évidemment tendance à évoluer avec celle de la Bourse: quand le cours (général) de la Bourse est à la hausse, les sicav (sauf si leur «panier» a été mal constitué) ont tendance à augmenter.
Les Hedge Funds, qui sont aux mains de spécialistes de la finance, vont au contraire jouer sur d'autres marchés «alternatifs» comme les matières premières, l'immobilier, le rachat ou la vente d'entreprises non cotées en Bourse ou le marché des changes (entre monnaies). Il s'agit de techniques financières compliquées, et on se limitera à un seul exemple, celui des changes.
Les différentes monnaies (euro, dollar, livre sterling, yen...) ont un «cours flottant», c'est-à-dire qu'elles se comportent les unes par rapport aux autres comme des marchandises soumises à la loi de l'offre et la demande [2] : si les consommateurs européens achètent beaucoup de dollars (en fait ce seront les entreprises européennes importatrices qui feront ces achats) parce qu'ils veulent acheter beaucoup de biens américains, le prix du dollar va augmenter sur le cours des changes par rapport à l'euro. Pour un État, la dépréciation de sa monnaie (c'est-à-dire la perte de valeur de sa monnaie par rapport aux autres monnaies) pose certains problèmes: le prix des importations va augmenter, ainsi que le remboursement des emprunts faits éventuellement à l'étranger; les investisseurs étrangers, qui auront investi par exemple en dollars, seront moins bien rémunérés par une monnaie nationale moins chère et craindront de faire de nouveaux investissements si la monnaie nationale menace d'être à nouveau dévaluée; plus grave, les entrepreneurs nationaux et tous les gens fortunés auront tendance à placer leurs avoirs dans une monnaie plus forte, à l'étranger, provoquant ce qu'on appelle une fuite de capitaux...
Un gouvernement peut alors décider d'adopter un taux de change fixe par rapport à une autre monnaie considérée comme une référence (notamment d'un point de vue commercial): ainsi, la Grande-Bretagne avait décidé dans les années 1990 que la livre sterling s'alignerait sur le Système Monétaire Européen (ancêtre de l'euro actuel). Cela signifiait que la Banque Centrale du Royaume-Uni s'engageait à échanger la livre (à l'achat ou à la vente) toujours à la même valeur par rapport à la monnaie européenne.
Un spéculateur, George Soros, dirigeant d'un Hedge Fund (le Quantum Fund situé aux Antilles néerlandaises, un paradis fiscal où les impôts sont minimes) a estimé quant à lui en 1992 que la livre était «surévaluée», l'économie britannique n'étant pas alors assez performante (notamment parce que ses produits étaient trop chers à l'exportation à cause du taux de la livre). Soros s'est mis alors à spéculer contre la livre en pariant sur sa dévaluation prochaine.
Si la banque centrale britannique constatait que la livre baissait sur le marché des changes, elle devait, pour maintenir son taux élevé, racheter de grandes quantités de sa propre monnaie, c'est-à-dire en fait vendre les réserves de monnaie étrangère dont elle disposait. En principe, ces réserves étaient bien supérieures à celles dont disposait le Hedge Fund de George Soros. Mais celui-ci a fait jouer un puissant «effet de levier»: il a «vendu à découvert» d'énormes quantités de livres, c'est-à-dire qu'il a emprunté à court terme environ quinze milliards de livres sterling qu'il a aussitôt revendus pour acheter des dollars en faisant le pari que le gouvernement et la Banque centrale britanniques devraient, face à cette attaque massive et dans ce court laps de temps, procéder à une dévaluation. Bien entendu, George Soros a mené au même moment une intense campagne publicitaire pour convaincre d'autres spéculateurs de la baisse prochaine de la livre sterling: si la livre allait baisser, il fallait évidemment la vendre pour acheter une autre monnaie plus forte comme le dollar! Face à un tel mouvement, la Banque centrale a dépensé en vain ses réserves de devises étrangères, et la livre a été finalement dévaluée. Soros n'avait plus qu'à échanger la plus grande partie de ses dollars contre des livres dévaluées pour rembourser ses créanciers. Au passage, il (ou plus exactement son fonds spéculatif) conservait le bénéfice de l'opération, un milliard de dollars d'après certaines estimations.
1. Il ne s'agit pas d'une moyenne au sens mathématique du terme mais d'un calcul complexe qui tient compte du nombre d'ordres de vente et d'achat ainsi que de leurs limites le vendeur d'un lot d'actions va par exemple offrir ce lot à la vente pour autant qu'elles atteignent un minimum, et à l'inverse, un acheteur potentiel fixera un plafond maximum au-delà duquel son offre d'achat ne sera plus valable . Les titres s'échangent donc en fonction du jeu pur de l'offre et de la demande.
2. Certaines monnaies comme le yuan chinois n'ont pas de cours flottant parce que le gouvernement chinois met des restrictions à la vente ou l'achat de sa monnaie: dans ce cas, la monnaie a un taux de change officiel.
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