Extrait du dossier pédagogique
réalisé par les Grignoux et consacré au film
Bach et Bottine
d'André Melançon
Canada (Québec), 1986, 1h35
Le dossier pédagogique dont on trouvera un extrait ci-dessous s'adresse aux enseignants du primaire qui verront le film Bach et Bottine avec leurs élèves (entre neuf et douze ans ans environ). Il contient plusieurs animations qui pourront être rapidement mises en œuvre en classe après la vision du film.
On pourrait dire que Bach et Bottine raconte l'histoire de personnages qui sont seuls et qui vont apprendre à vivre ensemble Mais vivre ensemble, ce n'est pas toujours très facile! Les désirs de l'un (écouter de la musique fort) ne s'accordent pas toujours aux désirs de l'autre (lire au calme). Il arrive aussi qu'un événement n'ait pas le même sens pour l'un et pour l'autre: Fanny ajoute la photo de Jean-Claude sur son Rubik's cube[1] pour lui montrer combien elle l'aime et Jean-Claude est furieux qu'elle ait découpé une photo à laquelle il tenait énormément
Dans ces situations, les personnages n'arrivent pas toujours à dire ce qu'ils ressentent. Mais les spectateurs comprennent quand même leurs réactions, parce qu'il y a d'autres signes que la parole qui traduisent (et parfois trahissent!) les pensées et les sentiments.
Dans le cadre scolaire, il est intéressant d'expliciter les comportements, les réactions et les sentiments des personnages.
Invitons les jeunes spectateurs à revenir sur un certain nombre de scènes (reprises dans l'encadré ci-dessous) et à dire ce que pensent ou ce que ressentent les personnages à ce moment-là.
Qu'est-ce que nous comprenons, nous spectateurs, que les personnages ne disent pas?
1.Le Rubik's Cube (on devrait dire en français le cube de Rubik) est un jeu, un casse-tête, inventé en 1974 par un architecte hongrois, Ern Rubik, et qui s'est rapidement répandu dans le monde au cours des années 1980. Après cet effet de mode, il est devenu sans doute moins populaire mais est encore largement répandu.
Ce que ne disent pas les personnages
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En explicitant ce qui se joue dans les scènes reprises ici, on peut faire une sorte de portrait de chacun des personnages principaux. Voici, par exemple, ce que l'on pourrait dire de
Jeune, il était amoureux de la maman de Fanny, comme le laisse croire le regard qu'il lui porte sur la précieuse photo. Il s'est donc sans doute disputé avec son frère en raison de cette rivalité amoureuse («Pourquoi vous vous êtes chicanés?» demande Fanny). Jean-Claude n'a jamais dit à la maman de Fanny qu'il l'aimait et elle s'est mariée avec son frère. On peut penser que Jean-Claude s'est alors éloigné et n'a plus donné de nouvelles que de manière épisodique (comme le lui reproche gentiment la grand-mère).
Quand Fanny arrive chez lui, il est très vite partagé entre le désir de continuer sa vie de célibataire qui connaît peu de contraintes et la tendresse que lui inspire Fanny, parce qu'elle est une jeune fille adorable, mais aussi parce qu'elle est la fille de la femme qu'il a aimée. Cette contradiction se traduit en de nombreuses occasions: il veut faire adopter Fanny, mais il ne veut pas qu'elle aille dans un orphelinat; il se trompe complètement de cadeau de Noël mais se fâche de manière un peu disproportionnée sur le marchand qui n'a pas bien attaché les pinces des homards; quand Fanny est en classe de neige, il se rend compte qu'elle lui manque, mais il n'interrompt pas les démarches pour son adoption!
Peut-être échaudé par son échec amoureux, Jean-Claude s'est enfermé dans une vie de célibataire où il ne connaît pas de contrainte, pas de conflit, mais pas non plus le bonheur d'être ensemble. Ainsi, l'on comprend vite qu'il en pince pour Bérénice (il garde sa photo cachée dans un livre; il se dit très heureusement surpris par sa visite, etc) mais il n'a jamais cherché à nouer une relation amoureuse («Ce n'est pas l'autre qui aurait fait le premier pas» dit une de ses collègues en voyant Bérénice lui offrir un cadeau à l'occasion de son départ) Jean-Claude a sans doute du mal à dire ses sentiments: il n'en a jamais fait part à la maman de Fanny, ni à Bérénice, ni à Fanny elle-même à laquelle il s'est profondément attaché
À onze ans, Fanny est une toute jeune fille charmante et pleine de vie. Orpheline, ses parents lui manquent, mais elle semble avoir accepté qu'ils ne sont plus là et ne reviendront plus. Elle porte alors toute son affection à ses proches: sa grand-mère, puis Jean-Claude, Bérénice, Charles, ainsi qu'à ses animaux. Sans doute recueille-t-elle tous les animaux abandonnés, parce qu'elle s'est trouvée elle-même abandonnée à la mort de ses parents.
Fanny est pleine de vie et d'enthousiasme et contrairement à Jean-Claude, elle parle! Elle dit à Jean-Claude qu'elle l'aime beaucoup, elle dessine de gros cœurs rouges à son intention, elle pose parfois des questions que l'on pourrait trouver indiscrètes si Fanny n'était pas aussi sincère et bienveillante: elle demande à Jean-Claude pourquoi il s'est disputé avec son propre frère (qui est donc le papa de Fanny), s'il a jamais dit qu'il l'aimait à la femme dont il était amoureux (qui est donc la maman de Fanny); elle demande aussi à Bérénice si elle a été mariée et si elle est amoureuse de Jean-Claude.
Fanny a beaucoup de caractère et elle refuse de se laisser faire. Quand elle est importunée par un garçon qui la drague, elle le remet à sa place en criant et en tirant la langue; elle n'accepte pas non plus les décisions que Jean-Claude prend et qui la concernent au premier chef; elle manifeste sa colère chaque fois qu'il est question de la faire adopter; elle quitte le concours d'orgue et se rend d'elle-même dans sa famille adoptive pour montrer à Jean-Claude combien elle est fâchée. Et quand celui-ci se rend dans cette famille pour parler avec elle, elle refuse le dialogue parce que celui-ci arrive trop tard. Impressionné, Jean-Claude se retire alors et c'est elle qui court pour le rejoindre.
Fanny voudrait que Jean-Claude délaisse un peu la musique et qu'il s'occupe un peu plus d'elle et de Bérénice
Elle est amoureuse de Jean-Claude mais n'ose manifester son attachement que lors de son départ pour une année sabbatique. Peut-être est-elle un peu impressionnée par la passion exclusive de Jean-Claude pour la musique, qui semble ne laisser de place pour rien d'autre dans sa vie. Elle a déjà connu un échec amoureux et peut-être que cela aussi contribue à sa timidité envers Jean-Claude. C'est néanmoins elle qui fait le premier pas, en lui offrant un cadeau spécial et en lui rendant visite pour l'inviter au réveillon.
Bérénice prend petit-à-petit plus de place dans la vie de Jean-Claude et de Fanny: elle va faire des courses avec Fanny, échange des confidences avec elle et prend sa défense quand Jean-Claude la gronde injustement.
Il s'installe ainsi peu à peu des relations entre Jean-Claude, Bérénice et Fanny qui ressemblent aux liens qui existent dans une famille! Et cela se marque particulièrement quand Jean-Claude et Bérénice se retrouvent tous les deux à la réunion de parents dans l'école de Fanny!
Dans le film, Fanny écrit une belle lettre à Jean-Claude pendant qu'elle est en classe de neige. Malheureusement, elle déchirera cette lettre avant qu'il ait pu la lire parce qu'elle est furieuse qu'il veuille toujours la faire adopter par «une vraie famille» alors qu'elle désire seulement vivre avec lui.
Une lettre, c'est souvent un bon moyen de dire ses sentiments.
Invitons les enfants, par groupe de deux par exemple, à écrire une lettre qu'un des personnages aurait pu écrire à un autre. Par exemple, une lettre de Jean-Claude pour Fanny, ou une lettre de Bérénice pour Jean-Claude
On peut choisir comme expéditeur et comme destinataire les personnages principaux du film (Fanny, Jean-Claude, Bérénice) mais aussi des personnages un peu moins importants, comme Charles ou la grand-mère ou même pourquoi pas? les parents décédés de Fanny. Dans cette lettre, le personnage pourrait évoquer une scène du film, revenir sur un événement qu'il a vécu et dire ce qu'il a ressenti.
Les lettres seraient ensuite lues à l'ensemble de la classe et commentées.