Extrait du dossier pédagogique
réalisé par les Grignoux et consacré au film :
Les Convoyeurs attendent
de Benoît Mariage
Belgique, 1999, 1h30
Le dossier pédagogique dont on trouvera un court extrait ci-dessous s'adresse aux enseignants du secondaire qui verront le film Les Convoyeurs attendent avec leurs élèves (entre treize et dix-huit ans environ). Il contient plusieurs animations qui pourront être rapidement mises en œuvre en classe après la vision du film.
L'on proposera ici de travailler sur les émotions que peuvent exprimer les jeunes spectateurs. La «matière première» sera constituée de toutes les réactions affectives suscitées par des images du film, indépendamment du contenu narratif des scènes où elles s'inscrivent.
Le recueil de photos que nous proposons n'est pas limitatif, et toute la liberté sera accordée aux élèves de travailler sur d'autres plans remarqués pour leurs particularités esthétiques. Simplement dans ce cas, ces plans n'auront d'autre support que le souvenir qu'ils en ont gardé. Quant au recueil d'images (seules deux images sont reproduites ici, le dossier imprimé en comprend une série de seize), nous suggérons qu'elles soient découpées pour être plus facilement manipulées. Ainsi, dans un premier temps, les documents pourront ainsi circuler librement dans la classe.
Au préalable, l'enseignant soulignera que chacune de ces images témoigne d'un regard particulier sur un morceau de réalité, et il spécifiera qu'il s'agit de l'apprécier comme tel.
Chaque élève sera ensuite convié à choisir une ou plusieurs photo(s) qui le frappe(nt) ou le séduise(nt) par la poésie qu'elle(s) dégage(nt), par son (leur) étrangeté, ses (leurs) qualités esthétiques, ce qu'elle(s) exprime(nt) avant d'entamer l'activité proprement dite, qui sera menée dans une double direction.
L'on décrira successivement ce qui fait que l'image accroche le regard (ses traits originaux, quels qu'ils soient), et ce qu'elle pourrait bien exprimer au-delà de sa signification purement narrative. Autrement dit, l'on se penchera d'abord sur ses qualités plastiques, la nature du sujet représenté et le traitement spécifique de ce sujet, avant de décrire l'impression qu'elle produit ou accentue (par exemple, une impression de tristesse, de nostalgie, de solitude, d'étrangeté, de poésie pure, ), et ce qui est ainsi mis en exergue (la souffrance, la beauté, le dénuement, le drame, l'absurdité, l'idée de liberté, de bonheur, une conception de la vie, )
Une fois ce double aspect de l'image traité individuellement, une discussion collective sera l'occasion pour chacun de faire part aux autres de son point de vue personnel. Dans la mesure où l'activité a fait grandement appel à la subjectivité individuelle, chaque avis sera apprécié et respecté comme tel.
L'étape suivante, quant à elle, sera accomplie par petits groupes d'élèves, qui se formeront en fonction des affinités qui se seront petit à petit dessinées au fil de l'analyse. Précisons dès le départ que l'objectif de ce travail d'équipes sera de préparer, à partir de ce que l'on vient de verbaliser, un travail sur le genre du film, en tâchant de reconnaître, dans les images observées, des caractéristiques présentes dans l'uvre d'artistes connus ou moins connus. Cette activité sera menée dans un premier temps sur base des connaissances antérieures des élèves, et poursuivies ensuite par une recherche empirique, qui devra être définie, discutée et organisée par les élèves eux-mêmes au sein de chaque groupe. Trouver des documents présentant l'une ou l'autre analogie avec les images du répertoire maintenant bien connu de tous en sera le but.
On pourra éventuellement lancer les élèves sur quelques pistes pour démarrer. Par exemple, dans le dossier de presse consacré au film, Benoît Mariage évoque sa prédilection pour des photographes français comme Doisneau ou Lartigue, dont on imagine pouvoir retrouver une certaine influence dans sa manière de filmer. Les plans embrumés des terrils et des charbonnages peuvent faire penser à la «Houillère», intitulé d'une série de clichés pris par le photographe belge Gustave Marissiaux. Quant au plan du clandestin «sans tête», il apparaît comme une véritable citation d'une photographie de Raymond Depardon prise dans un hôpital psychiatrique. Dans le domaine de la peinture, on peut penser aux peintres de l'école de Barbizon, notamment à Millet (les paysans au milieu de leur champ dévasté par une averse de grêlons) et aux peintres surréalistes comme Magritte (la porte dressée au milieu du jardin, le panneau publicitaire qui traverse le paysage) ou encore Paul Delvaux (les paysages de gares ferroviaires dans la nuit).
Selon les diverses trouvailles, des informations pourront être communiquées de groupe à groupe, l'objectif n'étant pas de «gagner» en repérant un maximum de références mais bien d'atteindre une parfaite collaboration pour obtenir l'éventail de documents le plus large et le plus exhaustif possible.
Insistons sur le fait que, pour cette recherche, qui sera restreinte aux domaines de la peinture et de la photographie, les élèves resteront totalement libres. Les consignes et limites de travail seront fixées par et pour le groupe.
Ce sera par conséquent l'occasion de tester ici les capacités d'autonomie et la mise au point de méthodes de travail (orientation de la recherche, répartition des tâches, méthodes d'investigation, traitement de l'information, gestion du temps,...)
Plus productive par ailleurs, cette démarche conduira sans doute à de multiples découvertes authentiques (autrement dit, non induites), l'analogie pouvant porter, rappelons-le, sur n'importe quel plan (sujet, composition, traitement du sujet,...).
Une présentation des documents devant l'ensemble de la classe ainsi qu'une explication des analogies perçues viendront mettre un terme à cette animation, qui aura permis aux élèves de maîtriser toute une série de données (noms d'artistes, de tableaux) et d'entrer immanquablement en contact avec quelques grands courants artistiques. Si on le désire, un travail sur le genre du film pourra être ensuite entrepris (voir l'animation 4 [non reproduite sur cette page WEB]).
[1] Les deux images reproduites ici (le dossier imprimé en propose 16) sont des photogrammes, c'est-à-dire des images tirées du film lui-même. On distinguera les photogrammes (qui correspondent exactement à ce que le spectateur a vu lors de la projection) de ce qu'on appelle les photos d'exploitation qui accompagnent la sortie du film et qui sont prises par un photographe indépendant dont le point de vue ne coïncide jamais exactement avec celui de la caméra.