Sur l’histoire classique d’un couple de quadras en crise, le cinéaste espagnol Jonás Trueba réussit une joyeuse comédie sentimentale, ludique et spirituelle, qui fait la fête au romantisme en réenchantant l’amour
Après 14 ans de vie commune, Ale et Alex ont une idée un peu folle : organiser une fête pour célébrer leur séparation. Si cette annonce laisse leurs proches perplexes, le couple semble certain de sa décision. Mais l’est-il vraiment ?
Ce point de départ loufoque s’inspire ouvertement de celui de Maris et femmes (1992) de Woody Allen dans lequel un couple annonce sa séparation à ses amis. Plus globalement, Septembre sans attendre renvoie aux canevas des comédies sentimentales hollywoodiennes classiques dans lesquelles le couple, en crise, doit passer par une série d’épreuves pour finalement se retrouver.
Cela n’empêche pas cette production espagnole (Label Europa Cinémas à la Quinzaine des Cinéastes à Cannes) de trouver sa place et sa singularité derrière des références qui auraient pu être encombrantes. Les clins d’œil cinéphiliques participent d’une tonalité d’ensemble qui, tout en contrastes recherchés, associe le jeu aux sentiments, le futile au sérieux, la citation à l’approche personnelle, la simplicité à l’expérimentation. à l’image de l’écriture du scénario qui, tout en assumant son côté vaudeville attendu, s’amuse à combiner les niveaux (le film dans le film) avec une mise en abîme du métier de cinéaste, sans que nous ne perdions jamais trace du plus important : la vitalité des relations humaines en train de se (re)construire.
Ce film intimiste, portés par des dialogues malicieux qui donnent le rythme, des décors intérieurs qui enrobent l’action de leur chaleur et une galerie de personnages qui font l’éloge de la vie en groupe, parle finalement bien moins des raisons d’une séparation que d’amour.
En son cœur, il y a deux êtres à la croisée des chemins (la fameuse crise de la quarantaine), à la recherche du temps perdu et d’un nouveau départ. Que leur challenge les oblige à mieux se connaître apporte une couleur burlesque et une fraîcheur de ton qui distingue fort à propos Septembre sans attendre des films romantiques tire-larmes. Ici, il y a de la joie et de l’humour malgré tout, beaucoup d’émotion surtout, car dans « séparation », on peut parfois lire « retrouvailles ».
Nicolas Bruyelle, les Grignoux