Depuis quatre générations, les femmes d’une même famille sont atteintes par le cancer du sein, une maladie qu’elles ont tue, révélant parfois seulement la veille de leur mort qu’elles en souffraient. L’Amazone s’inscrit dans le sillage de leurs histoires à travers le portrait de la mère d’une de ses réalisatrices, qui est bien décidée cette fois à se faire guerrière
Avec ce premier film, Emilie Maréchal et Camille Meynard se sont emparées d’un sujet doublement périlleux. D’abord, parce qu’on ne manque pas de documentaires sur le combat contre la maladie. Ensuite, parce que face au corps qui vacille, le cinéma du réel doit sans cesse se réinventer. Mais dès ses premières images, L’Amazone affirme toute la singularité et la finesse de son approche du quotidien. La protagoniste, vue de dos, essaye différentes prothèses mammaires, tandis que sa fille Camille commente, parfois curieuse, parfois amusée, cette partie du corps qu’on tente de faire exister dans ses moindres détails. D’emblée, le film annonce que c’est dans les détails précisément que se jouera l’histoire : un visage inquiet, une voix qui hésite à poser une question, le geste d’une kinésithérapeute filmé en très gros plan, un furtif regard caméra. Au gré de séances de discussion, de promenades et de rendez-vous médicaux ou paramédicaux, on découvre progressivement et sans suspense artificiel une histoire familiale qui
par des films de famille en Super 8, les plans fixes très sobres de L’Amazone entrent en dialogue avec les images tremblées du passé, s’engageant dans un étonnant jeu de champ contre-champ par-delà les années. Si L’Amazone est donc un documentaire sur un combat, ses combattantes défient moins la maladie que le mutisme passé de femmes qui par sacrifice, pudeur ou honte, ont passé sous silence le mal qui les rongeait. L’Amazone leur offre ainsi, dans le présent du documentaire, une victoire et une réconciliation.
JEREMY HAMERS, ULiège